L’intelligence artificielle est-elle la prochaine bulle spéculative ?
Intelligence Artificielle : Sommes-nous à la veille d'une bulle technologique ?
Une explosion des investissements dans l’IA : progrès ou bulle en formation ?
Le secteur de l’intelligence artificielle (IA) connaît un afflux sans précédent d’investissements à hauteur de plusieurs milliards de dollars. Si cette dynamique rappelle l’époque de la bulle internet, elle suscite aujourd’hui un débat croissant parmi les investisseurs, analystes et décideurs politiques : assistons-nous à la naissance d’un bouleversement durable ou à une nouvelle bulle spéculative ?
Selon une récente enquête de BofA Global Research, 54 % des gestionnaires de fonds estiment que les actions liées à l’IA se trouvent déjà en territoire spéculatif, contre 38 % qui jugent ce risque exagéré.
Des airs de déjà-vu avec l’ère des dot-com
Malgré l’enthousiasme ambiant, plusieurs experts restent sceptiques quant à l’impact réel de l’IA à court terme. Pour certains, l’engouement actuel est largement surfait et potentiellement voué à une correction brutale.
Ben Dawson, Vice-Président Senior chez Cisco pour la région Asie-Pacifique et Chine, compare la situation à celle des débuts d’internet : un cycle classique de forte excitation, d’investissements massifs, et de correction, avant que la technologie ne s’impose durablement.
Dawson insiste néanmoins sur le fait que la transformation induite par l’IA est bien réelle. Comme avec internet, les entreprises qui résisteront seront celles qui intégreront l’IA comme levier stratégique, et non comme simple gadget.
Rôle des gouvernements et régulation internationale
Les politiques publiques jouent un rôle croissant dans l’orientation du cycle de l’IA. Aux États-Unis, les administrations Trump et Biden ont positionné l’IA comme enjeu clé pour la sécurité nationale et la compétitivité économique, à travers des incitations financières et réglementaires encourageant l’innovation privée.
La Chine adopte une approche dirigée par l’État, investissant massivement dans ses propres entreprises d’IA pour limiter sa dépendance envers les technologies américaines. En Europe, un équilibre est recherché entre régulation responsable et dynamisation de l’innovation, comme en témoignent le plan d'action AI Continent et le fonds Apply AI d’un milliard d’euros.
- Les fonds souverains, comme celui de Singapour, parient sur l’IA malgré des revenus encore modestes.
- Le risque ? Des actifs potentiellement "bloqués", comme les réseaux fibre restés inutilisés après l’éclatement de la bulle internet.
Avertissements du marché sur une possible bulle IA
La Banque d’Angleterre a récemment mis en garde contre un risque de correction sévère des marchés si la confiance envers l’IA s’érode. Elle estime que les valorisations gonflées autour de l’IA pourraient avoir un impact "matériel" sur la stabilité financière britannique.
Certains économistes craignent que le rythme actuel d’investissement dépasse de loin les rendements à court terme. D’autres considèrent que ces investissements massifs sont le socle indispensable pour soutenir les innovations futures.
Investir dans l’infrastructure : miser sur le long terme
Simon Miceli, directeur général de l’infrastructure Cloud et IA chez Cisco, explique que l’on ne doit pas craindre la surcapacité, mais plutôt s’assurer que le monde est prêt à absorber la révolution industrielle de l’IA.
Il anticipe une correction du marché, mais juge les besoins futurs en puissance de calcul suffisamment significatifs pour justifier les investissements actuels. « Il s’agit d’une course à la capacité IA », déclare-t-il.
Des points de vue contrastés dans le secteur
Les experts ne sont pas tous d’accord sur la nature de cette dynamique. Lors du Milken Institute Asia Summit 2025, Bryan Yeo (GIC Singapour) a souligné une surévaluation manifeste de nombreuses startups IA à revenus modestes.
Jeff Bezos, fondateur d’Amazon, rappelle que l’histoire des innovations montre souvent un emballement spéculatif… mais aussi des retombées technologiques durables.
Joseph Briggs, économiste de Goldman Sachs, estime que les dépenses actuelles en infrastructure IA restent soutenables économiquement, bien que l’identité des réels "gagnants" demeure incertaine.
D’autres, comme le PDG d’ABB Morten Wierod, considèrent que le marché n’est pas en bulle, mais plutôt ralenti par les limites des chaînes d’approvisionnement. Le FMI, quant à lui, juge peu probable qu’une éventuelle baisse de l’IA provoque une crise systémique, car les investissements ne sont pas basés sur la dette.
Sam Altman, CEO d’OpenAI, reconnaît l’excitation actuelle du marché et prévoit que certains investisseurs perdront gros — tandis que d’autres réaliseront des gains records.
Une étude d’UBS révèle que 90 % des investisseurs, bien qu’inquiets d’une possible surchauffe, conservent leurs actifs en IA — preuve que la majorité croit encore à un potentiel non épuisé.
Un cycle d’innovation, pas un effondrement
Malgré les signes de survalorisation, une majorité d’experts s’accorde à dire que l’IA représentera une révolution de long terme. Comme l’a mentionné Ben Dawson, chaque transition technologique passe par une phase de bulle avant de livrer ses promesses.
Le véritable enjeu aujourd’hui est de savoir comment les entreprises et les investisseurs navigueront à travers les turbulences… pour bénéficier pleinement de la transformation en cours.
@ReservoirLive
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